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Marcel BÉALU, Filles de la lune

Coutumes et métiers, La Pérégrination fantasque, 1951



Les filles de la lune sont difficiles à attraper. On les confond souvent avec les filles de la terre. Ce me fut une grande joie d'en avoir, ce jour-là, un couple sous la main.

— Je m'appelle ColoquinteColoquinte. — Plante dont les fruits ronds, amers, fournissent un purgatif., dit la première, nous sommes venues au monde deux par deux dans ces gros œufs dorés qui tombent du ciel, les nuits d'août.

Elle était très jolie, toute rebondie, rose et ferme.

— Vous devez vous faire très mal en touchant le sol ? demandai-je vivement intéressé.

— Quand l'œuf se brise, l'une des occupantes amortit le choc... Elle s'en ressent toute l'existence. Mais l'autre est indemne.

Je me tournai alors vers sa compagne qu'on pouvait prendre, près d'elle, pour une ombre. Les cheveux et toute la personne respiraient l'odeur des livres ayant longtemps séjourné dans les ténèbres de lieux humides.

— Moi, on m'appelle Cloche. Parce que dans la lune les maisons sont des cloches. Cloches aussi les rues, cloches les gens, cloche le ciel. Cloche le peignoir du coiffeur, linceul pour décapité, cloche, cloche, double cloche, le monsieur sous son chapeau cloche.

— Cloche, cloche, cloche... chantonna pour se moquer Coloquinte.

Aussitôt la chétive créature se tut.

— Et vous, pourquoi vous appelle-t-on Coloquinte ?

— Mais... pour ça !

Ce disant elle pirouettait et avant de déguerpir, faisant voler très haut ses jupes elle me montrait cachée dessous une sorte de grosse citrouille zébrée de bistre et tachetée de lunulesLunules. — Taches en forme de croissant. vertes.




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